Bibliographie Livre d'or ***
 

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CALDANICCIA

NOS STATIONS THERMALES OUBLIEES

Publié dans "La Corse touristique" en janvier-février de l'année 1933

 

 

Au XVIII ème siècle, le long du ruisseau Cavallu Mortu, en rive gauche, juste avant la confluence avec la Gravona, plusieurs moulins (indiquant un certain débit du ruisseau à l’époque) sont localisés : Favaggiola et Bianco. Sur la rive droite, une source est indiquée : fontaine Favaggiola.
Au XIX ème siècle, on ne connaît pas la date précise de sa découverte, mais l’eau est analysée pour la première fois en 1826 (Professeur Poggiale : eau sulfureuse sodique).
En 1843, Sur le cadastre napoléonien, les bains de Caldaniccia sont bien dessinés pour la première fois. On y accède à partir d’un chemin non rectiligne à partir de la route de Bastia. Il y a une bâtiment d’accueil (les ruines de hôtel que l'on voit encore aujourd'hui), puis un chemin menant aux bains de forme circulaire et deux autres petites constructions annexes.
En 1866, sur la carte d’État major figure l’indication des bains de Caldaniccia. Les moulins y figurent également, et la source de Favaggiola. On accède aux Bains par un chemin rectiligne.

En 1950, le chemin menant aux Bains est bordé d'arbres de chaque côté. Le réseau ferré étant achevé depuis 1894, une gare a été construite et la voie ferrée passe juste à côté des bains.
En 2019, la zone industrielle de Baléone est installée. Le bâti de l’ hôtel est figuré. L’indication «les bains de Caldaniccia n’est présente que pour indiquer la gare ; les bains eux-mêmes ne sont plus représentés. En effet, dès 1957, le secteur est abandonné et en friche.

 

 

Absents du Plan Terrier, la source de Caldaniccia est située au confluent de la plaine alluviale de la Gravona et de Cavallu Mortu, à un peu moins de 9 kilomètres d'Ajaccio par la route, et à 50 mètres de la première station du chemin de fer d'Ajaccio à Bastia. Elle sort du granite granulitisant qui constitue le mamelon du Monte Sant'Angelo et est plus chargée en sulfure de sodium que les eaux de Guagno ou de Pietrapola.

L'autorisation d'exploitation est délivré le 02 décembre 1832 et un arrêté préfectoral du 16 mai 1839 entraînait la concession de la source thermale et du domaine qui l'entoure.

Une analyse effectuée en 1836 rapporte que la thermalité de cette eau sulfureuse sodique varie de 25° à 40° centigrades avec une température moyenne de 34,4 degrés. La température au niveau du réservoir à été estimée à 115°C. Elle a de nombreuses vertus thérapeutiques dans les domaines respiratoires et dermatologiques.

Les eaux émergent de cinq sources dont le débit est de 20.000 litres par 24 heures et de 14 litres par minute. C'est une eau limpide, incolore, inodore, d'un goût légèrement amer et salé. Elle est relativement peu utilisée, malgré sa proximité d'Ajaccio, la malaria rendant inhabitable la plaine du Campo dell' Oro de juin à octobre.

 

L'établissement de Caldaniccia est d'ailleurs assez primitif ; il est composé de 20 cabines avec des baignoires en zinc dont 4 cabines à deux baignoires.

Les indications thérapeutiques des eaux de Caldaniccia sont les suivantes:
1° Les rhinites chez les scrofuleux, les pharyngites et les angines chroniques.
2° Les laryngites chroniques à forme torpide, les laryngites granuleuses, le catarrhe bronchique, la tuberculose chronique sans hémoptysies.
30 La dyspepsie nervo-motrice, la dyspepsie atonique.
40 Le rhumatisme léger chez les sujets nerveux, excitables, la goutte atonique.
5° Le catarrhe vésical chronique, les engorgements de la prostate, la blennorragie chronique.
60 Les dermatoses simples, l'eczéma chronique.
7° Les métrites chez les femmes lymphatiques ou à tempérament nerveux, les périmétrites, la métrite du col, la dysménorrhée avec état névropathique.
8° Les états scrofulo-lymphatiques, les enfants lymphatiques avec végétations adénoïdes.

 

La caractéristique de ces eaux thermales est toujours la suivante : situées à quelques kilomètres d’Ajaccio, à moins d'une demi-heure d’auto ou de chemin de fer du chef-lieu du département, il n'y a peut-être pas de source thermale moins fréquentée que Caldaniccia. De ce point de vue qui avait fait naître tant d'espoirs, l'échec de la station, seulement fréquentée par quelques douzaines d'Ajacciens en été, a été complet.

On peut dire qu'il s'explique, si paradoxal que cela paraisse, du fait même de la proximité de la ville. L'époque venue des saisons balnéaires, les gens recherchent en même temps le bain thermal propice au traitement des rhumatismes et la cure de repos et de montagne. A cette catégorie d'usagers, Caldaniccia, donc, ne convient pas car elle est trop près de la ville, et en plaine.

Et pourtant, cette proximité reste un élément d'exploitation, car il existe pour Caldaniccia une clientèle en puissance, qui est celle des gens qui n'ont pas ou les moyens ou le temps de s'absenter complètement durant la durée normale d'une saison thermale, A cette clientèle, qui sentirait avant tout le besoin des bains d'un point de vue strictement thérapeutique, Caldaniccia doit pouvoir offrir certaines commodités.

Elle ne les a pas par le chemin de fer puisque le dernier train du soir – le direct Bastia-Ajaccio - ne s'arrête pas à Caldaniccia ; il faut donc que les usagers qui y vont par les trains du matin retournent à Ajaccio aux chaudes heures de la canicule, par celui de 2 h. 30. Cet inconvénient signalé, il y a celui de l'état un peu vétuste des bains et de l'ennui profond de pleines heures à passer dans la brousse desséchée de Caldaniccia.

 

Cliquer sur une photo pour l'agrandir ou voir le diaporama. (Photos JS.TIMOTEI)

 

Si l'on voulait tenter un effort pour donner aux eaux thermales de Caldaniccia l'essor qu'elles méritent, nous y contribuerions volontiers en attirant l’attention du public sur ses caractéristiques diverses.

Ces eaux sont de connaissance récente, par rapport, à celles de Guitera, de Guagno, de Pietrapola, de Puzzichello, d'Orezza, et même d'Urbalacone, de Caldane et de Baraci. C'est par hasard qu'elles furent découvertes en 1831, sur la partie du territoire de la commune de Sarrola-Carcopino qui confine à celui d'Ajaccio, au pied d'un mamelon, à quelques mètres de la Gravona.

En 1839. M. Venderhaze, un industriel continental en demanda au propriétaire, qui était le département, la concession. Le conseil général la lui accorda avec un périmètre de protection et dès le 11 de décembre les sources étaient déclarées d'utilité publique.

Le concessionnaire s'était obligé aux termes du contrat, à capter les eaux, à édifier un bâtiment thermal et à y adjoindre un vaste hôtel suivant un plan préparé par l'architecte départemental, et comprenant chambres de repos pour les baigneurs, salon de lecture et de conversation, salle de billard, restaurant, promenades ombragées, jardins avec tonnelles... Comme on le voit, le plan prévoyait toutes les commodités, notamment pour un séjour diurne, destiné aux Ajacciens qui seraient rentrés coucher en ville.

Mais les dépenses qu'il avait faites ne correspondant pas aux résultats qu'il en avait espéré, ce concessionnaire ne poussa pas son programme plus loin que la première partie. On voit encore le pavillon en rotonde qu'il construisit pour emprisonner la source, les cabines et même l'hôtel qu'il édifia sur la petite colline.

En 1850, il cédait ses droits à un certain M. Rivalz, de Marseille, lequel les céda à son tour à Dominique Forcioli .

En 1951, les droits étaient détenus par Mme Gabrielle Gregory demeurant à Nice.

Or, presque dans le même temps, une station continentale possédant les mêmes caractéristiques que Caldaniccia s'organisait : Eaux-Bonnes, dans les Basses-Pyrénées, un insignifiant village perdu dans la montagne, lançait ses eaux, et l'on sait ce que celle station est devenue : une des plus riches de France. Eaux-Bonnes avait l'avantage de sa situation continentale, sans doute ; mais, toutes proportions gardées, Caldaniccia, à quelques kilomètres d'Ajaccio,  eût pu avoir un meilleur sort, si la clientèle n'avait pas été effrayée par la crainte du paludisme.

En 1957, un arrêté met fin à l'exploitation des eaux de Caldaniccia.

 

Laissés à l'abandon depuis les années 1970, la gare, les captages et les bâtiments de la station thermale sont en ruine. Cependant, aujourd'hui, la perspective d'un développement du thermalisme en Corse est réaliste et cette source, par son emplacement privilégié, près d'Ajaccio, devrait avoir les plus grandes chances de réussite.

 

En 2022, au mépris de toutes considérations pour ce patrimoine, le tracé de la voie routière “la pénétrante Est” condamne A Caldaniccia. La source thermale chaude proche d’Ajaccio, dont les eaux ont un potentialités curatives et géothermiques semble définitivement condamnée. Les associations dénoncent ce qui passe sur les anciens bains de la source thermale et sur les meilleurs lieux connus de forages, hypothéquant ainsi toute future utilisation curative (eaux utilisées dans les domaines respiratoires et dermatologiques – et géothermique – eaux du réservoir profond à plus de 100 °C constituant ainsi une ressource énergétique importante ).
Les travaux routiers envisagés passent au-dessus du champ de fractures du site et condamnent toute exploitation de ces eaux. Les risques de pollution du réservoir sous-jacent ne sont pas négligeables. Il est regrettable que les données scientifiques établies dès 1986 n’aient pas été utilisées pour positionner giratoire et routes de façon à préserver ce patrimoine naturel. Les forages réalisés avant 1986 n’excèdent pas une soixantaine de mètres. Une ressource géothermique potentielle est à rechercher avec des forages profonds (200 à 400 m), à condition de prendre dès maintenant des mesures de protection du réservoir profond.

 

 

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Date de mise à jour pour cette page : 14 juin 2023