PORTOFERRAIO |
|
|
|
|
|
|
Cliquer sur une photo pour
l'agrandir ou voir le diaporama |
Laissant une France complètement exsangue, Napoléon embarque à Saint Raphaël dans le
plus grand secret et quatre jours plus tard, dans la nuit du 03 au 04 mai 1814, la frégate Anglaise Undaunted
accoste dans le petit port de
Portoferraio, capital de l'Île d'Elbe. Il s'apprête à faire une
entrée majestueuse avec les 600 hommes qu'on lui a alloué, mais seuls, le gouverneur militaire
Delesme et le Sous-Prefet Balbiani ont été informés de la présence à
bord, du monarque déchu et c'est seulement le 04 mai au matin que les
habitants vont prendre connaissance de l'arrivée de leur nouveau
souverain par une proclamation placardée sur les murs de la cité : "Le plus heureux événement qui pût jamais illustrer l'histoire
de l'île d'Elbe s'est réalisé en ce jour ! Notre auguste souverain
l'Empereur Napoléon est arrivé parmi nous. Nos voeux sont accomplis
: la félicité de l'île d'Elbe est assurée…Unissons-nous autour de sa personne sacrée, rivalisons de zèle et
de fidélité pour le servir…".
Le 04 mai
1821 à 15 heures Napoléon quitte la Frégate Undaunted et dans une
chaloupe se rend sur le port où les autorités civiles et militaires,
ainsi qu'une foule à la fois enthousiaste et stupéfaite, sont venus
l'accueillir tandis que les cloches sonnent à toute volée. Il est ensuite reçu à l'hôtel de ville où il va passer ses premiers
nuits ; mais c'est aux Molini, sur une crête qui surplombe la ville, qu'il a déjà décidé
d'établir sa résidence.
Afin de ne pas avoir à traverser la ville pour rejoindre la campagne, il commence par faire
percer un tunnel dans le rocher sous la terrasse, fait raser les
vieux moulins et entreprend la construction de son "palais"
et de ses pavillons : des appartements privés avec huit
fenêtre en façade donnant sur la ville et huit fenêtres à l'arrière
avec vue mer, une bibliothèque, une salle du trône faisant office de
salle de bal, un petit théâtre.
Le tout est abondamment meublé, principalement par deux
razzias dont Napoléon est coutumier : Une première
fois il fait saisir à Piombino, dans l'ancien palais de sa
soeur Elisa restitué au domaine autrichien, meubles,
tentures, jalousies, jusqu'aux lames des parquets.
Au commissaire d'Autriche qui se plaint de cette spoliation,
il fait remettre l'état circonstancié de cet "emprunt", et
l'affaire en reste là.
Un peu plus tard, la tempête ayant
forcé un bâtiment à faire relâche dans le port, Napoléon
s'enquiert de son chargement : c'est le mobilier de son beau
frère Camille Borghèse, acheminé de Turin à Rome. Il se
l'approprie aussitôt, disant : "cela ne sort pas de la
famille !".
PORTOFERRAIO - La villa des Mulini |
|
|
|
|
|
Cliquer sur une photo pour
l'agrandir ou voir le diaporama |
Avec ses compagnons
d'infortune Drouot, Bertrand et Cambronne, entouré d'un nombre
incalculable de domestiques en livrée, de musiciens, de jardiniers
et de 22 palefreniers qui veillent à l'entretien de 90 chevaux et de
27 voitures, Napoléon a recréé autour de lui une cour d'opérette.
Pour tromper son ennui, il va mener pendant son séjour une vie faite de dépenses
ostentatoires et de réceptions somptueuses.
Cette vie tranquille s'anime soudain
le 30 septembre, avec l'arrivée
de sa soeur Pauline qui va occuper la partie de l'habitation qu'il a
fait construire spécialement pour Marie-Louise qui ne viendra jamais.
Cette intimité entre
Napoléon et sa soeur Pauline, le fait qu'elle a toujours été sa
préférée et qu'elle à souvent été à ses côtés, donnera lieu à de
nombreux ragots colportés principalement par Beugnot et Talleyrand
pour lesquels les relations incestueuses du frère et de la soeur n'ont jamais fait aucun doute.
Lassé de la villa des
Molini, Napoléon recherche bientôt une maison de campagne et il fini
par jeter son dévolu sur une maisonnette située dans le vallon ombragé de
San Martino. Mais l'état de ses finances, déjà mises à mal par un train de vie
dispendieux, ne lui permet pas
d'accepté le prix demandé par le propriétaire et c'est sa soeur
Pauline, qui à sa demande, va en faire l'acquisition en sacrifiant
quelques diamants de son fameux collier. En peu de temps, les
vieille bâtisses du domaine sont rasées, les grenadiers de la garde
construisent une route pour accéder à la propriété sur laquelle est
édifiée une maison blanche toute simple surmontée d'un étage et
modestement meublée.
SAN MARTINO |
|
|
|
|
Cliquer sur une photo pour
l'agrandir ou voir le diaporama |
Plus tard, le Prince
Demidoff (*), neveu de Napoléon par alliance, rachètera la
propriété et transformera San-Martino en faisant preuve d'un mauvais goût offensant,
pour lui donner l'aspect outrancier que le visiteur attribue
injustement aujourd'hui à Napoléon.
(*) Pour la petite histoire, les aigles surplombant l’ancien château Bacciocchi (actuel collège
Saint-Paul) à Ajaccio, proviennent d’un don d’Anatole Demidoff à son cousin
Félix Baciocchi dans les années 1840).
C'est encore au cours d'une promenade que
Napoléon succombe au charme
de l'Ermitage de la Madonna sur le monte Giove au dessus des
villages de Marciana Alta et de Poggio, en découvrant un panorama somptueux avec au loin,
Capraia et la Corse. Du 23 août au 05 septembre 1814, il séjourne
dans une des cellules de l'ermite tandis que Drouot en occupe une
autre. Il veille à ce que sa mère Laetitia, qui loge dans une
maison de Marciana Alta, ne manque de rien et il écrit à Bertrand :
"il me manque trois volets pour les fenêtres de ma
chambre… Envoyez trois rideaux pour la chambre de Madame, les
tringles y sont. Envoyez-nous aussi des feux. pincettes. pelles…".
Le 1er septembre 1814, durant son séjour à
l'Ermitage, il reçoit la visite de sa maîtresse Marie Walewska
(*) accompagnée de leur
fils, le petit Alexandre. Il est assez probable que cette visite
rapide n'ait pas été faite par amour mais pour demander à Napoléon
d'intervenir auprès de Murat pour que la rente de 60.000 francs
qu'il lui a alloué et que Murat refuse de lui verser soit payée. Napoléon passe
deux nuits avec elle, sans doute les dernières ; mais craignant la
venue de Marie-Louise, il lui demande le surlendemain de s'en aller.
Il le regrettera aussitôt et cherchera vainement après coup à la rejoindre
pour l'empêcher de partir. Il se consolera cependant avec d'autres
nombreuses conquêtes.
(*) Après
une cour assidue, Maria Waleska avait accepté, avec l'accord de son
mari, le comte Anastazy Walewski, d'être la maîtresse de Napoléon.
Devenue veuve, elle épouse le 7 septembre 1816, un Corse, le comte
Philippe Antoine D'Ornano, genéral d'Empire et cousin éloigné des
Bonaparte. Elle meurt le 11 décembre 1817 à l'âge de 31 ans.
ERMITAGE DE LA MADONNA DEL MONTE A MARCIANA ALTA |
|
|
|
|
|
|
|
Cliquer sur une photo pour
l'agrandir ou voir le diaporama |
Sous cet aspect de vie
insouciante qui trompe l'ennemi, le bilan de ces 300 jours d'exil
Napoléonien est cependant remarquable, comme en témoignent les nombreuses notes
et directives concernant la gestion de l'Île d'Elbe sur cette
période : Établissement d'un plan d'irrigation et de mise en valeur
de la seule plaine importante, celle de l'Acona, développement de la
culture de la pomme de terre dite parmentière, et qui est inconnue
dans l'île, vaste politique de reboisement (oliviers, mûriers,
châtaigniers), amélioration du ravitaillement de la ville en eau
potable, création d'un hôpital, construction d'un véritable
réseau routier qui va desservir les communes les plus importantes en
partant de Portoferraio, repeuplement de la faune ( lièvres et
lapins) importés de Toscane et de Corse. Puis Napoléon se tourne
vers l'Île de Pianosa qu'il décide d'annexer, de fortifier, de
peupler et de faire défricher.
Mais les habitants de
l'Île d'Elbe vont éprouver une profonde désillusion lorsqu'au matin
du 26 février 1815, Napoléon, que seul, Drout a essayé de dissuader, s'embarque secrètement pour la France
mettant brusquement fin à une ère de prospérité qui s'achevait aussi
vite qu'elle avait commencé.
Le 28 février 1815,
après être parvenu à déjouer la surveillance des fégates anglaises, Napoléon
débarque à Golfe Juan. C'est ensuite la marche vers Paris, le début des 100 jours
et le terrible carnage de Waterloo, puis Sainte Hélène et la mort
d'un ogre qui voulait dévorer le monde.