Dans la nuit
du 11 au 12 août 2009, dans la petite commune corse d'Albitreccia,
Andy Fromageau tue froidement ses parents et ses deux
frères jumeaux dans leur sommeil.
Rien ne saurait expliquer le déchaînement de violence
qui a poussé l'ainé de cette famille à sombrer dans
l'horreur. Andy était un adolescent choyé, âgé de 16
ans. Entouré par un père et une mère aimants, deux
jeunes frères jumeaux qu'il protégeait. Aucun passif,
pas de cris ni de drame dans cette famille sans
histoire, installée en Corse-du-Sud.
Ce jeudi 13 août 2009, les gendarmes de Pietrosella, à
quarante minutes d'Ajaccio, sont prévenus d'un quadruple
homicide sur la commune d'Albitreccia. Toute une famille
a été assassinée dans son sommeil, au domaine d'Alzone.
Peu de mystère autour de l'identité de l'auteur présumé
: le fils aîné de la famille, âgé de 16 ans, s'est
dénoncé.
L'un de ses oncles l'a retrouvé quelques heures
auparavant, alors qu'il errait, désorienté, sur la plage
d'Agosta. Face aux gendarmes, Andy apparait en état de
choc. Il déclare qu'il a tué son père Patrice, sa mère
Nadine, et ses frères jumeaux, Duane et Liam, âgés de
seulement dix ans.
Dans la maison familiale, les gendarmes découvrent une
scène de crime des plus glaciales. Les parents, Patrice
et Nadine gisent dans leur lit, couchés sur le ventre.
Le visage du père est caché par un oreiller. Tous deux
ont été touchés au cœur et au thorax.
Les jumeaux sont retrouvés dans leurs lits respectifs.
Liam a été touché à une main, sans doute voulait-il se
protéger, puis à la tête. Duane à l'avant-bras droit et
également à la tête.
En garde à vue, Andy raconte avec beaucoup de détail le
déroulement des crimes survenus la nuit précédente.
Ce
soir-là, ses parents étaient invités à dîner chez des
voisins ; lui, avait été chargé de la garde des jumeaux.
L'adolescent décrit une soirée banale, sans incident. Il
n'avait consommé ni drogue, ni alcool. Lorsque ses
parents rentrent il ne dort pas. Vers 3 heures du
matin, il est sorti de son
lit de façon mécanique et après avoir enfilé des
gants en latex, il passe devant le râtelier où se
trouve le fusil à pompe Winchester de son père, il
l'attrape, le charge machinalement et mène son
expédition macabre en abattant d’abord son père puis
sa mère avant de se diriger vers la chambre de ses
frères, les jumeaux de 10 ans Liam et Duane, qu'il
avait dû revenir achever dans le noir. Andy
déclarera plus tard qu'il les avait entendu gémir,
et comme il ne voulait "pas qu'ils souffrent", il
les a achevés "en visant la tête".
Avant de partir, il s’empare de 2500 euros d’argent liquide qui se
trouvent dans le coffre fort de la maison et dans le
portefeuille des parents.
Andy dira qu'il avait dans l'idée de
s’enfuir; Mais aux alentours de 4 heures du matin, le lycéen avait
appelé la police et dénoncé un enlèvement par des
cambrioleurs, puis il avait erré dans le maquis et sur
la plage non loin, avec quelques vêtements et objets de
valeur de la famille dans un sac. A une amie croisée par
hasard, il dit lui avoir avoué le quadruple meurtre sans être
pris au sérieux par la jeune fille.
C’est l’alerte
donnée par son cousin qui avait poussé son oncle à
emmener Andy à la gendarmerie le lendemain. Face aux
enquêteurs, il avait tout avoué sans pouvoir livrer une
seule raison d'avoir commis un tel acte, évoquant une
«irrésistible pulsion».
Au cours de son procès qui s’est tenu à huis clos du 12
au 17 novembre, Andy déclare avoir eu une envie
irrépressible de tirer, une pulsion plus forte que lui :
"Je ne sais pas pourquoi j'ai fait ça, je ne savais plus
ou j'étais, je n'entendais plus rien et je voyais tout
flou. Il y avait quelqu'un d'autre à ma place".
Après plusieurs décisions contradictoires, la Cour
d'assises des mineurs de Corse-du-Sud déclarera Andy
coupable mais "irresponsable" de ses actes.
Le jeune
homme est resté prostré pendant tout le procès, les yeux
dans ses chaussures. Il a tout écouté, enregistré, il
s’est montré attentif, mais sans émotion visible.
Il est resté impassible à
l’annonce du verdict. Il Le
seul moment où il s’est mis à pleurer spontanément,
c’est lorsque a été relatée l’autopsie de ses deux
frères.
Après le procès Andy sera hospitalisé d’office dans une
unité pour malades dangereux près d’Avignon.
L’affaire n’est pourtant pas close, car ce lundi 19
novembre 2012, le parquet a fait appel. Maître Fabienne
Boixel-Sanna, avocate de la famille paternelle, qui
s’était portée partie civile, revient sur l’audience.
L’entretien a été effectué avant que l’on connaisse la
décision du parquet.
L’avocate énonce le début d’un scénario qui pourrait
tenir lieu d’hypothèse : « Lors de l’autopsie des
parents, on a noté que la mère était en nuisette, le
père sans bas de pyjama et un tube de lubrifiant se
trouvait sur le lit. Aussi bien pour le juge
d’instruction que pour le président des assises, que
pour moi-même, il était extrêmement délicat de demander
à Andy s’il avait été réveillé cette nuit-là par les
ébats sexuels de ses parents, les portes étant grandes
ouvertes, l’été. Si la scène sexuelle, insupportable
pour l’adolescent, est l’élément déclencheur, il est
logique qu’il soit impossible pour lui de l’avouer et de
se l’avouer. Il y a une pudeur à aborder ces faits. Mais
cette hypothèse reste une extrapolation et n’explique
rien, fondamentalement ».
En décembre 2013, le jeune homme a été déclaré irresponsable du meurtre de ses
parents et de ses deux frères en 2009.
La famille des victimes – et de l’accusé – « attendait
une condamnation ». Mais la cour d’appel
d’Aix-en-Provence, devant laquelle Andy était à nouveau
jugé, en a décidé autrement : le jeune homme,
aujourd’hui âgé de 20 ans, a été déclaré irresponsable
du meurtre de ses proches, commis en août 2009. L’avocat
général avait pourtant requis une peine de 12 à 15 ans
de prison à l’encontre d’Andy, dont il rejetait
« l’irréalité » et qu’il accusait de « mensonges ». La tante
d’Andy, interrogée par France 3 Corse, a dénoncé « un
crime pas cher payé ».
L'avocat général Gilles Rognoni a relevé un
certain nombre de mensonges de l'accusé, mais a
souhaité tenir "compte de l'altération du
discernement" au moment des faits, après une
succession à la barre d'experts psychiatres aux avis
très divergents sur la question de sa
responsabilité.
" Il a menti sur pas mal de points ", a
expliqué le représentant du parquet, soulignant les
incohérences entre les déclarations lors de
l'enquête de l'accusé, qui a par exemple toujours
affirmé ne pas avoir touché au corps de ses parents,
quand les expertises balistiques et médico-légales
ont démontré le contraire.
La dissimulation de certains détails tendent à
démontrer que ces meurtres ont été prémédités, selon
les termes des experts, par un "psychopathe
ordinaire".
Andy est actuellement en licence de biologie, qu’il
poursuivra donc depuis le centre de Montfavet.
La
question principale de ce second procès était l’absence
de discernement, ou non, de l’adolescent au moment des
faits. De nombreux experts et psychiatres se sont
succédé à la barre mais ne sont pas parvenus à un accord
sur l’état psychique dans lequel se trouvait le lycéen
dans la nuit du 11 au 12 août 2009, tout comme lors du
premier procès. Andy lui-même affirme qu’il a « peut-être
eu une crise d’épilepsie » qui l’aurait poussé au drame.
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