Dans les années
soixante, lorsque j’étais enfant,
j'habitais avec mes parents dans la rue Roi de Rome,
tout près de la place du Diamant, au dessus des
établissements Catanéo.
Mon
plaisir était de descendre sur le port regarder
partir et revenir les bateaux qui déversaient sur
les quais des tonnes de marchandises ; mais le
véritable spectacle était celui du chargement et du
déchargement des automobiles que des palans
soulevaient du sol pour les faire disparaître dans
le ventre du navire sous le regard inquiet de leurs
propriétaires.
Comme beaucoup de jeunes de ma génération, je me
souviens de ces grands navires à coque noire venus
du large qui accostaient lentement au quai L’Herminier
et qui avaient pour nom Cyrnos, Sampiero Corso,
Commandant Quéré, Comté de Nice… toute une époque
aujourd’hui révolue.
Je me
souviens de ma première traversée avec mon père sur
l’un de ces navires au confort très rudimentaire
lorsque les traversées de jour n’existaient pas
encore et que la nuit, les passagers "aisés"
dormaient dans des cabines à même des banquettes
fixes recouvertes de skaï de couleur vert bouteille,
tandis que ceux de quatrième classe dormaient sur le
pont, sur des chaises longues en toile, enroulés
dans d'épaisses couvertures fournies par la
compagnie.
En
regardant ces grands bateaux venus du large, je ne peux
m'empêcher de penser au nombre incalculable des
naufrages survenus dans toutes les mers du globe, depuis
que l'homme s'est aventuré sur la surface des océans qui
couvrent les trois quarts de la surface de notre terre.
Combien d'êtres humains ont péri dans les flots à la
suite de tant de catastrophes maritimes !. C'est
effrayant quand j'y songe. Rien que sur les côtes de la
France, dans une période de quinze années, de 1865 à
1880, une statistique officielle a relevé 1346
naufrages, ayant entraîné la mort de 949 personnes.
Les 1346 navires perdus sur nos
côtes se décomposaient ainsi : 99 vapeurs ; 102
trois-mâts ; 71 bricks ; 78 bricks-goélettes ; 125
goélettes ; 152 cotres et sloops ; 99 lougres ; 38
chasse-marées ; 582 tartanes, chaloupes ou bateaux
divers.
Les équipages de ces 1346 navires
comprenaient 8346 marins ; il y eut donc 7397 sauvés et
949 noyés.
De cette statistique, il ressort
qu'il y a eu au cours de cette période de
quinze années, pas moins de 122 naufrages sur les côtes
de la méditerranée et 46 naufrages sur les côtes de
Corse. La compagnie Valery a été l'une des compagnies
les plus touchées par ces drames entre 1840 et 1883.
Rien que sur la côte est du
Cap-Corse, il y aurait
une trentaine d'épaves connue, datées de
l'Antiquité à nos jours. Quatre d'entre elles ont été
étudiées dans le cadre de la mission de la DRASSM (Département
des recherches archéologiques subaquatiques et
sous-marines). Trois d'entre elles, nommées Macinaggio 1, Capo Sagro 1
et Capo Sagro 2, correspondent à
trois navires romains, et
sont datées du premier
siècle avant Jésus Christ au IVe siècle.
À ces épaves, s'ajoute un autre
bateau qui est bien plus récent : Le Bonaparte. Ce navire de passagers
construit en 1847
a coulé le 19 d octobre de la même année à la suite d'une collision sur le trajet Bastia-Livourne...
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Chargement
d'une automobile sur l'un des
paquebots à coque noire de la Cie
Générale Transatlantique,,
Le SAMPIERO CORSO, dans les années 1960.
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A partir de 1908, la Compagnie Fraissinet
utilise pour l'embarquement des automobiles,
des cadres de fer avec lesquels il était
possible de soulever des poids maxima de
1800 kg. La Compagnie proposait, moyennant
supplément, des assurances et des bâches de
protection pour les véhicules.
(*) Dans une correspondance émanant du Directeur
Général des Postes datée du 5/9/1825,
adressée au Préfet de la Corse, nous avons
une indication sur la durée de la traversée
avec les bateaux à voiles de l'époque :
Six, sept jours par temps ordinaire, douze,
quinze ou vingt jours et même plus lorsque les vents sont contraires....
La durée de la traversée passe de 10 jours en 1815 à 6 jours en 1838.
Celle-ci pour les trois principaux ports de Corse est de l'ordre de :
14,5 jours pour Bastia/Marseille, 8,5 jours pour Ajaccio/Marseille,
8,0 jours pour lIe-Rousse/Marseille.
De 1815 à
1830 les échanges entre la Corse et le Continent sont
ceux d'un pays évolué économiquement et un pays sous
développé. La Corse exporte des produits agricoles et
des matières premières, elle importe des produits
industriels ou de consommation et surtout des produits
alimentaires. Les passagers tiennent un rôle secondaire. Certains
Corses ont trouvé un excellent moyen de se rendre sur le
Continent à moindres frais, ils se font engager comme
marins et cela est d'autant plus facile que les
équipages de voiliers ne sont jamais fixes et sont
libérés à chaque arrivée..
Le nombre de passagers sur ces bateaux est en moyenne de
4 à 5 par traversée.
En 1830, le nombre de voiliers enregistrés à leu arrivée à Marseille en
provenance de Corse est de 49. Ces voiliers sont de type
Mistick, Bombarde, Goelette, Tartane, Chebeck,
Balancelle, Brig, Pinque, Cutter.
Dès 1825, un premier projet d'établissement de lignes régulières
entre Toulon et la Corse avec des bâtiments à vapeur..
Le trajet se
fera en trente six heures au plus d'une manière
régulière et sans avoir égard à l'état de la mer. Ce
projet restera sans suite.
Le deuxième projet d'établissement de services maritimes entre la
Corse et le Continent avec des bateaux à vapeur date de
1828. Ce projet encouragé par les pouvoirs publics
n'aboutira pas non plus.
Le mérite d'un premier service régulier entre la France
Continentale et la Corse avec des bateaux à vapeur
reviendra à la Compagnie Toulonnaise GERARD et Fils en
1830.
(*) Corsica Marittima - Charles Finidori
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