Henry-René-Albert-Guy
de Maupassant est né le 5 août 1850, au château de Miromesnil,
en Normandie. Selon certaines sources, il serait né à Fécamp.
Toute sa vie, il vécut sous l'influence d'une mère
caractérielle,
Laure Le Poittevin, qui soignait sa maladie nerveuse par
toute la pharmacopée de l'époque mais qui avait cependant une
grande culture littéraire. Décrit comme une force de la nature,
Maupassant eut cependant une vie brève et tragique, marquée par
une syphilis contractée en 1877 à l'âge de 27 ans; une maladie
qu'à son époque on ne sait pas encore soigner et qui se
terminera dans la folie.
En dix années, sous différents pseudonymes
(Joseph Prunier, Guy de Valmon, Manfrigneuse...) il ne
publia pas moins de 6 romans, 300 contes et nouvelles et de
nombreuses chroniques dans des journaux comme le figaro, le
Gaulois, etc... qui le rendirent populaire.
En 1860, Laure, séparée de son mari,
quitte Le Havre et s'installe à Étretat avec ses deux enfants.
Après avoir passé sa jeunesse entre le
collège et la campagne, Maupassant vient habiter Paris en 1870
et entre comme employé au Ministère de la marine où il va s'ennuyer
terriblement. En 1880, il fait paraître Boule de Suif
et le succès de sa nouvelle le décide à quitter
l'Administration.
Puis c'est une période de production
intense de 1880 à 1890 pendant laquelle il écrit toutes ses
oeuvres, à raison de trois volumes par an en moyenne. Il voyage
beaucoup, il est illustre ; c'est l'heure de gloire et de génie
et rien n'arrête les excès auxquels il se livre. Comme son ami
Flaubert, il va explorer toutes les bassesses de l'âme humaine
en goûtant à tous les plaisirs de la chaire, se donnant à des
filles faciles, fréquentant assidûment les bordels, se ventant
d'avoir possédé quelques 300 femmes. Un jour, il écrit à son ami
Flaubert pour lui faire savoir qu'il a couché avec six filles en
une heure. Flaubert rapporte : "Il m'a écrit récemment qu'en
trois jours il avait tiré dix-neuf coup ! C'est beau ! Mais j'ai
peur qu'il ne finisse par s'en aller en sperme..."
Complètement addicte au sexe, Maupassant écrit : "J'aime la
chaire des femmes du même amour que j'aime l'air, les rivières
et la mer". Lorsqu'il se confie à son ami Flaubert en lui
écrivant : "Le cul des femmes est monotone comme l'esprit des
hommes ...", celui-ci lui répond : "Vous vous plaignez du
cul des femmes que vous trouvez monotone, il y a un remède bien
simple, c'est de ne plus vous en servir...".
Le dégoût de la société, des idées
morbides, le poussent à faire des farces macabres jusqu'à
se peindre son sexe aux couleurs de la vérole pour le montrer à
ses conquêtes.; tantôt ce sont des araignées qu'il offre à ses
petites amies, tantôt ce sont des grenouilles qu'il offre à la
belle comtesse Potocka, sa maîtresse.
Mais
voici que déjà le temps du malheur est venue ! Dès 1880, les
premiers troubles oculaires apparaissent; il perd pratiquement la
vue de l'oeil droit. En 1889, il entreprend un long voyage et mène
une vie errante à bord de son yacht "Bel ami". En 1890, sa
plume défaillante n'écrit plus rien; une maladie qui ne pardonne pas
s'est abattue sur son cerveau et il perd la mémoire. Tourmenté par
des fantômes, souffrant d'autoscopie, angoissé de ne plus voir son
ombre, il sombre lentement dans la folie comme son frère Hervé avant
lui mort à 33 ans. A demi fou, il erre de cures thermales en cures
thermales ordonnées par ses médecins, à la mer réchauffante de la
Côte d'Azur. Il écrit : "J'éprouve chaque jour en me rasant un
désir immodéré de me couper la gorge". En janvier 1892, à
Cannes, "cette noire mélancolie de vivre", un
désespoir sans
fond, l'emmènent par deux fois à faire des tentatives de suicide;
C'est alors que sa mère consulte le psychiatre Émile Blanche, qui
juge nécessaire de le faire interner dans sa clinique à Paris le 7
janvier. Atteint d'une meningo encéphalite accompagnée d'une
paralysie générale, il meurt à 43 ans 06 juillet 1893 en
prétendant être le fils de Dieu.
Guy de Maupassant âgé alors de 30 ans, a
séjourné deux mois en Corse, de septembre à octobre 1880.
Il est venu y rejoindre sa mère Laure en villégiature et
malade qui séjourne depuis de
long mois déjà dans la ville ajaccienne.
Il débarque du Ville de Madrid le 8
septembre et passe sa première nuit à l'Hôtel de France.
Précédé d'une certaine
notoriété, il dira : "Mon arrivée à Ajaccio a été un
triomphe. Tous les journaux de la ville ont annoncé ma venue en
termes magnifiques".
Voici comment il décrit son arrivée à Ajaccio : "L'horizon pâlit vers
l'orient, et, dans la clarté douteuse du jour levant, une tache
grise apparaît soudain sur l'eau. Elle grandit comme sortant des
flots, se découpe, festonne étrangement sur le bleu naissant du
ciel. On distingue enfin une sorte de montagne escarpée,
sauvage, aride, aux formes dures, aux arêtes aiguës, c'est la
Corse".
À Bastelica, Guy de Maupassant et sa mère
se lient d'amitié avec le docteur Jean -Baptiste Folacci,
conseiller général de son canton et son neveu; ils séjournent
également dans la maison Martinetti, chez le docteur Roch Paoli et son
épouse.
Ajaccio semble manquer cruellement de
loisirs au yeux de Maupassant ; alors, un de ses petits loisirs consiste à
s'attabler à la terrasse du Solferino, du Napoléon, du Roi
Jérôme ou du café des Nations. Et pour agrémenter ses journées qu'il
trouve un peu monotones, il s'en va "faire minette",
comme dit, avec les pensionnaires du Cinq rue
des Glacis où chez les dames galantes du café de la gaîté tenu
par Adrienne Richard.
Le 24 septembre, Maupassant se rend au monastère de Corbara
pour rendre visite au père Henri Didon,
un prédicateur dominicain renommé mais controversé, car jugé
libéral, qui s'y est exilé
de 1880 à 1881. Ce périple le conduit à travers la montagne, à
Letia chez les Paoli et les Arrighi, à Vico où il laisse sa mère
trop fatiguée pour continuer. Il continue par les forêts d'Aïtone
et de Valdoniello, traverse Albertacce dans le Niolo et fait
une halte dans la maison du docteur Albertini.
A la fin du trajet, il prend le temps de contempler San Antonino,
ou encore l'église de La Trinité d'Aregno.
Il passera quelques heures avec les religieux
avant de se rendre à Calvi où il n'y passera qu'une seule nuit
avant de reprendre la route de la côte qui le mènera à Piana et
jusqu'aux Calanche, "une des merveilles du monde", avec
le Niolo selon lui.
De retour à Ajaccio, le 16 octobre, Maupassant reprend le bateau
à destination de Marseille. Dans ses bagages, il emporte un
dernier article pour le journal Le Gaulois Une page
d'histoire inédite qui raconte l'épisode de l'embuscade de
Napoléon à Bocognano.
Maupassant reviendra une deuxième et dernière fois en Corse en
1881. Il en profitera pour visiter Bonifacio, une ville qui lui
servira d'inspiration pour écrire sa nouvelle Une Vendetta
qui sera publiée une première fois dans la revue Le
Gaulois du 14 octobre 1883 puis dans le recueil
Contes du jour et de la nuit en 1885.
La Corse a offert à Maupassant de nombreux thèmes
d'inspiration. Il y fit maintes fois référence dans des
nouvelles et des articles :
Son roman
Une vie,
publié en 1883, raconte les mésaventures de Jeanne, jeune
aristocratique dont les seuls moments de bonheur lui seront
apportés par son voyage de noce en corse, une longue promenade à
cheval qui la conduira, avec son fiancé d'Ajaccio à Bastia.